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De la maison de ville à l’Hôtel de Ville

La maison de ville

Durant une longue période, qui va probablement de 1578 à 1876, la maison de ville (on ne parlait ni de mairie, ni de commune) se trouvait au bout de la rue de la Ville, dans la partie du Café des Sports proche de celle-ci, les deux autres tiers abritant le four banal où les habitants du village faisaient cuire leur pain. Un voisinage inquiétant qui provoque plusieurs incendies, notamment celui de 1741, intervenu au cours des fêtes de Noël. Les réunions se tiennent ailleurs plusieurs mois durant.

Le 30 septembre 1578 en effet, un échange est passé devant Me Henri Bresquet, notaire de Fronton qui a possédé et donné son nom au domaine situé sur la route de Campsas, entre François Jean et Jeanne Sabatier, d’une part, et les consuls du village, d’autre part. Ces derniers cèdent « une petite maison haute ou on avoit acoustumé fere le corps de garde », qui semble correspondre, d’après les confronts, à l’ancienne boucherie Claverie. En contrepartie, le couple donne une maison haut et bas, confrontant le four et l’actuelle rue de la Ville, avec « l’échelle entre deux par laquelle l’on monte pour aller fere la ronde ». Il s’agit bel et bien d’une aile du Café des Sports.

Les Marcorelle

L’Esplanade Baron de Marcorelle où se trouve actuellement la mairie est appelée ainsi depuis une délibération municipale du 28 février 1926, alors qu’Adrien Escudier était encore maire de Fronton. Auparavant, on parlait simplement des Esplanades, aucune des trois n’ayant un nom particulier, de la Promenade ou encore de la Terrasse, vu la situation en surplomb de celle-ci.

Qui sont les Marcorelle ? A l’origine, une famille roturière de Sainte-Eulalie-du-Cernon, pittoresque village de l’Aveyron, situé sur le plateau du Larzac, non loin de la Cavalerie et La Couvertoirade, autant de lieux appartenant à l’ordre de Malte.

La venue de quelques membres de cette famille se fait sous ce patronage. En effet, Jean de Marcorelle, d’abord curé d’Orgueil, dessert la paroisse de Fronton entre 1684 et 1708. Jean François ou François, son neveu, né vers 1676, lui succède jusqu’en 1740. Tous deux meurent en fonctions.

Agent du Grand-Prieuré de Toulouse et frère du précèdent, Paul Marcorelle (Sainte-Eulalie vers 1668 – Toulouse 5 avril 1757) épouse une Frontonnaise et se fixe ainsi dans notre village. Partageant son temps entre Toulouse et Fronton, comme la plupart des notables désireux de se hisser dans l’échelle sociale, il devient capitoul en 1731 et accède ainsi à la noblesse dite « de cloche ».

Marié en 1710 avec Marguerite Fornier, elle-même descendante des Dumotin, il se retrouve ainsi propriétaire d’un important pâté de maisons : la mairie actuelle, l’ancienne école « des filles » (qui fut précédemment celle des garçons) et la cour de celle-ci jusqu’au préau, les deux familles en question ayant acquis méthodiquement (les actes notariés en font foi) les demeures voisines (jadis, toutes ou presque ont une surface de 50 mètres carrés environ). La tour d’angle des remparts, qui correspond au bureau d’Evelyne Peyranne, était d’ailleurs connue sous le nom de tour Dumotin.

Paul Marcorelle a deux fils dont un célibataire, homme de lettres et de sciences, installé à Narbonne. Celui qui se marie lui donne deux petits-fils. Jean François Joseph, baron de Marcorelle (Toulouse 21 juin 1760 – Fronton 26 avril 1829) est l’un d’eux. Plusieurs facteurs lui ouvrent une destinée hors du commun. Visiblement, il est le préféré de son père, et pas seulement parce que l’aîné. Il traverse sans dommages la Révolution. Il devient député sous l’Empire et préside même le Corps Législatif, un honneur relatif puisque Napoléon, soucieux d’éparpiller les pouvoir, a fixé cette dernière fonction à un mois seulement. Ajoutez à cela un mariage avantageux avec une Parisienne, de nombreux biens immobiliers, une grosse fortune, du moins aux yeux des Frontonnais. Ebloui par sa réussite, il prétend descendre de Marc-Aurèle dont un portrait orne sa salle à manger.

Installé à Fronton à la fin de ses jours, il occupe les fonctions de maire. Il est alors veuf. Auguste, son fils, à peine âgé de dix-huit ans et déjà officier, a disparu pendant la campagne de Russie. Caroline (Paris 8 mai 1795-Fronton 12 octobre 1867), un peu demeurée, interdite judiciairement plus tard, épouse en 1825 Louis Henri Thérèse de Latour-Landorthe, frère de l’évêque de Pamiers, Aucun enfant ne naît de cette union.

L’hôtel de ville

Le testament du baron et surtout les divers codicilles montrent à l’évidence qu’il cherche à déshériter au maximum les héritiers de droit : son gendre qui manifeste sans doute trop d’appétit ; Ferdinand (qui recueillera le titre de baron) et Eugénie de Marcorelle, ses neveux. Il multiplie par exemple les legs, dont un, important, à la commune, à charge de créer une école et un hôpital, n’oubliant ni sa fille de service, ni des cousins éloignés qui résident à Nantes et ailleurs.

À la mort du baron puis de sa fille, la plupart des biens sont vendus. Le 30 novembre 1875 (Emile Garrigues, notaire de Fronton), la commune de Fronton, représentée par Emile Baville, alors maire, acquiert d’Eugénie de Marcorelle et de la veuve de Ferdinand « la maison sur la Promenade ayant une sortie sur la rue des Auques , avec cour, écuries et remises ». Montant : 40 000 francs. Depuis lors, il s’agit de la mairie… ou de l’hôtel-de-ville.

Jean-François Delord

 

Poursuivez le fil de l’histoire par une visite virtuelle dans le Fronton d’antan

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